Parler de réchauffement climatique et des relations algéro-françaises dans le même message tombe sous le coup du pléonasme. La lune de miel entre Paris et Alger continue au gré des bonnes affaires. Après un message de félicitations adressé par Abdelaziz Bouteflika au président français, pour «le succès» de la conférence sur le climat Cop21 à Paris, François Hollande fait vite de le remercier pour son «chaleureux message» qui lui va «droit au cœur». Jeudi dernier, François Hollande a ainsi adressé un message au chef de l’Etat algérien pour lui rappeler que «la France continuera, avec l’aide de l’Algérie, de mener tous les combats pour la sécurité, le développement économique et le développement durable au service de nos populations et, surtout, des jeunesses de nos deux pays». Rien, depuis sa visite d’Etat en Algérie en décembre 2012 et sa visite-éclair en juin 2015, ne semble tiédir les relations entre les deux dirigeants. La fameuse «alacrité» dont avait été gratifié le chef de l’Etat algérien par son homologue français lors de son passage à Alger, le 15 juin dernier, avait ajouté d’ailleurs un zeste de franche «complicité» à l’entente déjà établie entre Paris et Alger. Cette visite, qui avait intrigué par sa courte durée et son calendrier, avait d’ailleurs été jugée par beaucoup d’observateurs comme une volonté de Paris d’apporter un soutien franc et clair à Bouteflika, dont la maladie fait pourtant douter l’opposition sur sa capacité de continuer à diriger le pays. Ce soutien n’est d’ailleurs pas sans avantages pour le partenaire français, la bonne santé des relations économiques le prouve. Les contrats juteux qu’obtiennent les entreprises françaises sont là pour attester de la «chaleur» dans les relations entre les dirigeants français et algérien. «Alger ne refuse rien à Paris», dit-on. Transport, énergie, services, hydraulique, sécurité… Il n’est pas de secteur d’activité où les entreprises françaises ne sont pas présentes en force. Même l’exploitation du gaz de schiste, prohibée en France, est autorisée pour les compagnies françaises en Algérie. On ne peut d’ailleurs s’empêcher de faire le lien entre cet «épanouissement» commercial français en Algérie et le choix de Abdelaziz Bouteflika de se faire soigner dans ce pays. Hollande suggère d’ailleurs dans son message un nouveau domaine d’activité à explorer pour les entreprises de son pays. «L’Algérie peut compter sur la France pour l’appuyer dans l’application de ses objectifs en termes de maîtrise des émissions de gaz à effet de serre et d’adaptation aux impacts du réchauffement climatique. A cet égard, le prochain Comité intergouvernemental de haut niveau, lequel devrait avoir lieu les 20 et 21 février 2016, constituera une étape importante». Ainsi donc, Total pourra faire de la fracturation hydraulique pour extraire le gaz de schiste avec un haut risque de pollution des nappes d’eau souterraines dans le désert algérien, et une autre compagnie française viendra montrer aux Algériens comment réduire les émissions de gaz à effet de serre. Soit allier pollution de la terre et de l’eau et dépollution de l’air... En économie, polluer et dépolluer semble avoir le même sens : le gain. Et entre Etats, le réchauffement du climat permet de faire des affaires.
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El Watan