L’Algérie face au narcotrafic mondial

Une saisie record de 701 kg de cocaïne a été opérée mardi dernier au port d’Oran. La marchandise était dissimulée dans des containers chargés de viande congelée, importée du Brésil par un puissant promoteur immobilier de l’Algérois. Le port d’Oran a vécu une journée très particulière, en ce mardi 29 mai. Les services des Douanes, de la Marine nationale, des garde-côtes et de la Gendarmerie nationale étaient tous sur les lieux dès la matinée, en attente d’un bateau en rade, battant pavillon libérien, que les gardes-côtes escortaient pour le ramener à quai. Une fois arrivé, il est investi par les gendarmes et les douaniers qui procèdent à l’ouverture des containers. La découverte a été spectaculaire. Un nombre impressionnant de sachets de cocaïne était dissimulé au milieu des cartons de viande congelée, mais aussi de nombreux gilets de sauvetage munis de boules de reconnaissance. La quantité de drogue saisie a atteint 701 kg. Un record jamais atteint en Algérie. Selon des sources bien informées, cette prise a été permise grâce à la marine espagnole qui pistait son itinéraire. Le navire était dans les eaux territoriales ibériques, non loin de la côte valencienne, où il devait faire une escale, avant qu’il ne change de cap à destination d’Oran. Très tôt dans la matinée, les données sur la marchandise et le navire sont transmises aux gardes-côtes algériens, lesquels procèdent à son arraisonnement. L’ensemble des membres de l’équipage a été arrêté par les gendarmes, alors que le navire en question a été saisi en attendant la fin de l’enquête, qui cible également l’importateur Kamel Chikhi, un richissime et puissant promoteur immobilier, très connu dans l’Algérois. Enfant de Lakhdaria et âgé d’à peine 39 ans, il a érigé un empire financier qui fait de lui l’un des plus riches sur la place d’Alger. Sa spécialité, acheter d’anciennes villas qu’il détruit, pour construire à la place des tours immobilières luxueuses. A Bir Mourad Raïs, il a acheté un terrain boisé qu’il a défriché pour ériger une tour de 14 étages, provoquant la colère des riverains. Les nombreuses manifestations et les différentes plaintes déposées devant les tribunaux n’ont aucunement freiné les travaux de construction, comme cela a été le cas à Dély Ibrahim, où la population n’a pas réussi à bloquer les engins qui terrassaient une assiette de terrain pour en faire une promotion immobilière au milieu des habitations. A Sidi Yahia (Hydra), les travaux de construction d’une autre promotion ont provoqué un immense éboulement tuant sur le coup un enfant. Les mêmes scénarios se répètent à Kouba, où siègent plusieurs sociétés de ce promoteur, qui touchent à de nombreuses activités, y compris les panneaux solaires. Dans ce quartier où il est le plus connu, il détient la boucherie la moins cher sur le marché. En bref, la fortune de Kamel Chikhi et ses puissants relais et connaissances font de lui l’un des hommes les plus craints, mais aussi les plus suspicieux, au point de faire l’objet, récemment, de rapports sécuritaires sur des présumées opérations de blanchiment d’argent. Mardi soir, certains de ses entrepôts à Alger ont été perquisitionnés par les gendarmes. Pour l’instant, l’enquête n’a pas déterminé vers quel endroit les 701 kg de cocaïne étaient destinés et surtout s’il y a un lien avéré entre le promoteur et cette marchandise. Cependant, il y a lieu de faire remarquer que cette affaire de cocaïne rappelle celle de 2012, lorsque les autorités espagnoles avaient saisi 200 kg de cocaïne, et leur enquête a révélé que cette cargaison avait transité à Alger dans des containers d’une société qui importait des sanitaires d’Espagne, avant d’être expédiée vers ce pays. Arrêté, le propriétaire de la société n’a pas reconnu les faits, mais l’expertise du laboratoire de la Gendarmerie nationale a retrouvé des traces de cocaïne dans l’entrepôt des sanitaires. L’autre affaire similaire est celle des 156 kg, déclarés comme poudre de lait et retrouvés dans un container au port sec de Baraki, il y a quelques années. Ces énormes quantités laissent penser que des réseaux assez puissants de passeurs sont en train d’utiliser l’Algérie comme zone de transit pour la cocaïne qui vient d’Amérique latine et qui est généralement destinée au marché européen ou moyen-oriental. Qu’a-t-on fait de ces enquêtes et surtout a-t-on donné les moyens nécessaires pour lever le voile sur les grands bonnets de ce trafic, qui visiblement restent intouchables. Les quantités saisies génèrent des fonds considérables et, de ce fait, elles ne peuvent concerner un petit groupe de dealers mais plutôt de puissantes organisations criminelles transfrontalières qui ont des moyens financiers colossaux. Il y a là nécessité d’une enquête approfondie pour remonter aux barons et ne pas se limiter au menu fretin. Affaire à suivre...

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