Les libertés religieuses malmenées

Arrestations, répressions et des campagnes de dénigrement dans certains médias… la question du respect des libertés religieuses revient au-devant de la scène. Plusieurs années après les attaques subies par la communauté chrétienne en Algérie, les persécutions des citoyens ayant opté pour un rite autre que celui choisi par l’Etat se multiplient ces derniers mois. Cette fois-ci, ce ne sont pas les personnes ayant choisi «un culte autre que musulman» qui sont ciblées. Mais des communautés qui n’épousent pas le courant considéré comme étant la référence dans le pays. Le cas des Ahmadis est le plus édifiant. En l’espace de quelques mois — et suite à des articles souvent tendancieux de certains journaux — des gens se réclamant de cette «tariqa» sont devenus la cible des services de sécurité et de la justice qui prononce contre eux de lourdes condamnations. Leur chef en Algérie, Mohamed Fali, a été arrêté une nouvelle fois avant-hier à Aïn Sefra, alors qu’il se trouvait dans la maison de sa mère. Cette arrestation est, selon l’avocat et président d’une aile de la Ligue algérienne pour la défense des droits de l’homme, Salah Dabouz, une grave atteinte aux lois du pays qui garantissent «la liberté de culte et la liberté de conscience». «Les Ahmadis sont poursuivis parce qu’ils pratiquent leur religion (l’islam) d’une manière qui déplaît au ministre des Affaires religieuses qui considère qu’il existe un islam révérenciel pour les Algériens qui ne doivent chercher d’autre pratique que ce que lui considère comme le seul islam vrai, juste et authentique», explique l’avocat. Selon lui, le modus operandi de cette chasse à cette communauté est toujours le même. «Leur dossier (les Ahmadis, ndlr) commence toujours par les services du renseignement qui s’assurent que la personne concernée appartient bien au groupe ahmadi, après ils le transmettent aux services de sécurité (police et gendarmerie) qui l’envoient ensuite au juge d’instruction qui, dans tous les cas que j’ai défendus, ne fait que valider tous les rapports précédents. Enfin, les juges de siège valident le dossier et essaient de trouver un cadre légal pour justifier les condamnations», soutient-il. Les chefs d’inculpation retenus contre les membres de cette communauté sont souvent les mêmes, en l’occurrence «la collecte de fonds sans autorisation» et «activité dans une association non agréée». Le premier responsable des Ahmadis algériens, Mohamed Fali, ajoute l’avocat, «a été jugé et condamné, comme il est poursuivi encore pour les mêmes faits dans plusieurs tribunaux». «Parfois, il est jugé par le même tribunal, à l’exemple de celui de Boufarik, plusieurs fois, ce qui est complètement illégal», enchaîne-t-il. «Karkaria : tentatives de créer une autre affaire» Il y a quelques jours, une affaire liée, toujours, à la pratique de la religion. Des médias ont crié au scandale en découvrant l’existence — plus ancienne pourtant — d’une «tariqa» qui a de profondes origines algériennes, selon les spécialistes du soufisme. Il s’agit de la Karkaria, dont les adeptes ont subi des attaques, y compris de l’Association des oulémas. «Nous déplorons que l’Association des oulémas appelle les pouvoirs publics à intervenir pour réprimer les Karkaris. C’est dommage pour une association devant représenter tous les musulmans et non pas seulement les malékites», regrette Salah Dabouz, rappelant la multiplication des atteintes à la Constitution. «Il y a plusieurs violations non seulement de la Constitution concernant l’article 42 qui stipule que la liberté de conscience et la liberté d’opinion sont inviolables et que la liberté d’exercice du culte est garantie dans le respect de la loi», dénonce-t-il. De plus, l’avocat rappelle aussi le contenu des conventions internationales signées par l’Algérie, notamment la Déclaration universelle des droits de l’homme qui, dans son article 18, stipule : «Toute personne a droit à la liberté de pensée, de conscience et de religion ; ce droit implique la liberté de changer de religion ou de conviction ainsi que la liberté de manifester sa religion ou sa conviction seule ou en commun, tant en public qu’en privé, par l’enseignement, les pratiques, le culte et l’accomplissement des rites.»  

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