Entretien avec Tayeb Zitouni, ministre des Moudjahidine

Un sondage réalisé par l’Institut Ifop pour le compte de TSA fait ressortir que 52% des Français sont favorables à  ce que le gouvernement de leur pays présente des excuses pour les crimes commis en Algérie pendant la période coloniale. Que représente ce chiffre pour vous ?

C’est un point positif dans les relations algéro-françaises. Ce taux reflète en réalité une prise de conscience, un éveil du côté français. Je vous rappelle aussi que des élus français ont récemment demandé aux autorités du pays de reconnaître les massacres du 17 octobre 1961. C’est, pour nous, le bon chemin à suivre. Les relations entre les deux pays sont à la fois sensibles et compliquées. Elles exigent de l’audace, de la persévérance, un courage politique et une volonté de faire avancer les questions qui demeurent en suspens. J’espère que cela sera possible avec la nouvelle génération en Algérie et en France.

Vous avez l’exemple des relations franco-allemandes. Les deux pays ont pu surpasser le fardeau de l’histoire. Entre l’Algérie et la France existent aussi des relations fortes dans les domaines économique, culturel, éducatif. Reste à faire des efforts dans le segment de la mémoire et l’histoire. On est ouvert pour discuter de ces questions.

Sur le plan du discours officiel algérien, il y a eu paradoxalement un recul par rapport à la revendication de repentance…

Il n’y a eu ni rupture, ni recul. Seulement, de notre côté, on favorise les négociations par les canaux officiels, notamment à travers notre représentation diplomatique à Paris. Je confirme qu’il n’y a eu jamais de recul.

L’autre sujet qui empoisonne les relations entre les deux pays ces derniers temps concerne le rapatriement des crânes de résistants algériens. Est-ce que l’Algérie est déterminée à les récupérer ?

Évidemment. On souhaite récupérer les crânes aujourd’hui avant demain. Le dossier des crânes porte un volet humain et un volet historique. Cela renvoie une image négative sur  le pays de la démocratie, des droits de l’Homme et des libertés. C’est cruel et inacceptable. Nous ne voulons pas une nouvelle guerre. L’Algérie est un pays de paix. Les résultats de sondage publiés sur votre site sont encourageants. Je remercie le peuple français en souhaitant que cette tendance soit adoptée est suivie par la classe politique. Pour les crânes, nous avons une liste nominative, nous connaissons leur nombre exact. Il faut  maintenant que le dossier soit sérieusement traité.

Le dossier de la mémoire est incontestablement le maillon de la relation entre les deux pays…

Il est tout à fait vrai que c’est un dossier qui impacte l’avenir des relations bilatérales. Du côté algérien, nous sommes prêts à l’aborder avec sérieux et sincérité et avec une bonne volonté. Nous l’avons prouvé avec le premier déplacement du ministre des Moudjahidine en France.  Nous avons discuté avec la partie française, notamment sur le dossier des archives. Maintenant, il faut passer aux actes. On ne peut pas continuer parler et à exprimer des vœux dans les réunions.

Vous étiez justement en France en janvier. Trois commissions ont été mise en place, relatives aux archives, aux disparus et aux essais nucléaires dans le Sud algériens. Les choses ont-telles avancé depuis ?

Il y a des avancées sur le papier. Les commissions travaillent sans pour autant aboutir à des éléments concrets. Cela demande peut-être un peu plus temps ? N’oublions pas que la France vit une période pré-électorale.

Le dossier des biens vacants des pieds-noirs est-il clos ?

Oui définitivement. Et ce en application de la réglementation internationale et des lois algériennes. Ce ne sont pas les Algériens qui ont colonisé la France. Ce fut bien le contraire. S’il y a bien une partie qui est en droit aujourd’hui de réclamer quelques chose, c’est bien évidemment l’Algérie.

Concernant les Harki ?

C’est une affaire franco-française. Ils ont choisi leurs camps. Pour nous, les harkis sont des traîtres, des collaborateurs.

Les propos du président français François Hollande sur  la guerre en Algérie rapportés dans Un président ne devrait pas dire ça ont suscité une vive polémiques en Algérie…

Cela prouve, d’un côté, que les relations entre les deux pays sont sensibles et délicates. De l’autre côté, ces propos démontrent qu’il y a, en France, ceux qui ont toujours la nostalgie de l’Algérie française.

Cet article Entretien avec Tayeb Zitouni, ministre des Moudjahidine est apparu en premier sur TSA Algérie.



Admin

Enregistrer un commentaire

Plus récente Plus ancienne