Comment l’informel a pris de l’ampleur depuis 1990

L’économie informelle en Algérie est un phénomène alarmant. Les tentatives gouvernementales pour y faire face manquent cruellement de détermination, trahissant peut-être un manque de réelle volonté politique.

Or, une étude du Centre de recherche en économique appliquée pour le développement (Cread), une institution officielle, démontre l’évolution et l’explosion de l’économie souterraine dans le pays. En effet, l’étude porte sur la période 1990-2009 et évalue le poids de l’informel à près de 46,5%.

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Explosion de l’informel

Les données de l’étude démontrent une hausse sensible de l’informel entre 1990 et 2009. Au début de la période, le phénomène représentait moins de 42%, pour atteindre 46,43% 20 ans plus tard. Sauf qu’entre-temps, le PIB est passé d’environ 100 milliards à près de 120 milliards sur la période en question, en dollars constants, indique l’étude.

Ainsi, bien que la part de l’informel ait oscillé dans une fourchette de 41,6% à 46,5%, le phénomène a pris une ampleur considérable. En valeur, l’on passe donc de 41,6 milliards de dollars en 1990 à 55,72 milliards en 2009. Donc même en ajustant ces valeurs à l’inflation, la progression reste fulgurante.

Graphique 4

Les résultats de l’étude « montrent la profondeur du phénomène dans les structures économiques et sociales reflétés dans la dimension croissante de la taille de l’économie informelle au fil des ans », indique le Cread.

Par ailleurs, « les transformations économiques opérées dans le pays au cours des vingt dernières années ont certainement contribué à l’émergence fulgurante de cette économie en l’absence d’un système de régulation institutionnel efficace permettant de contenir la poussée incontrôlée de ce type de manifestation », poursuit la même source.

Comprendre : l’État n’a pas suffisamment joué son rôle de régulateur, en particulier dans un contexte de forte transformation de l’économie algérienne. C’est particulièrement le cas à partir de l’année 1999, avec le lancement massif de projets d’infrastructures à la faveur d’une manne pétrolière grandissante.

En effet, « à partir de l’année 1999, on note un dynamisme croissant de l’ENO qui s’expliquerait probablement par la relance économique qu’a connue l’Algérie sur cette période avec notamment l’exécution d’importants programmes de développement financés sur le budget de l’État », indique le Cread. Plus encore, cette période a « entraîné des dérèglements sur tous les plans (…) de type corruption, détournements de biens publics », ajoute la même source.

Les facteurs déterminants

Afin de déterminer les principales raisons de cette explosion, l’étude a pris en compte différents facteurs comme le prix du pétrole ou le poids de la fiscalité. Ce dernier n’a finalement pas été retenu parmi les causes déterminantes. Bien que « la charge fiscale (…) reflétée dans le système d’imposition des revenus influence lourdement le comportement des agents économiques à l’égard du respect ou du non-respect de la réglementation fiscale et sociale », le Cread  estime que le « prix de pétrole, fardeau fiscal (impôts directs, impôts indirects et cotisations sociales) n’ont pas d’impact décisif sur l’économie informelle. »

Parmi les principaux facteurs, l’étude retient « le taux d’inflation, les dépenses publiques, le taux du chômage et le SNMG ». Selon le Cread, un accroissement de 1% du taux d’inflation entraîne une hausse de 0.42% de l’économie informelle.

Par ailleurs, une augmentation de 1% du taux de chômage à pour conséquence une augmentation de 0.97% de l’économie informelle. Pour leur part, les dépenses publiques, en augmentation de 1%, donnent une augmentation de 1.46E-08% de l’économie souterraine. Enfin la baisse du SNMG de 1% « supposerait une augmentation de 0.07% » du phénomène, estime l’étude.

Comment y faire face

Pour y faire face, le Cread donne quelques pistes, bien qu’il ne détaille pas les mesures à prendre. Parmi les moyens de réduire la portée de l’économie informelle, l’étude préconise « une meilleure rationalisation des dépenses publiques, une gestion rigoureuse de la monnaie, une utilisation efficiente des ressources humaines ainsi qu’une répartition éclairée des revenus ».

Par ailleurs, le centre de recherche met en avant « l’exigence d’une meilleure gouvernance de l’économie algérienne ». Enfin, le Cread insiste sur « la réforme de l’État lui-même en réduisant le degré de bureaucratisation de l’économie, en assouplissant les réglementations publiques, en restructurant le secteur privé, en améliorant l’environnement des affaires », conclut l’étude.

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