La chute du baril de pétrole n’en finit plus. Selon vous, si cette baisse s’accentue, quel en serait l’impact sur les finances publiques du pays ? Je dois rappeler d’abord, qu’en 2015, avec un prix moyen du pétrole d’environ 50 dollars le baril, l’Algérie avait déjà consommé 35% de son fonds de régulation des recettes. Si les prix du brent se dirigent, courant 2016, vers une moyenne de 40 dollars, ou moins, nous allons consommé plus de 45% de ce fonds. En d’autres termes, si nous pouvons terminer l’année en puisant de ce fonds de régulation, l’année 2017 sera, cependant, l’année du déficit réel, en ce sens que le fonds ne sera plus en mesure de couvrir ce déficit budgétaire de l’Etat. Maintenant que nous avons une marge de manœuvre d’une année ou, tout au plus, d’une année et demie, il y a lieu de prendre des mesures à même de faire face à l’impact du choc externe sur les finances publiques. Mais il faut dire que l’Etat dépense trop, et il va être difficile de changer de comportement et de gérer une situation pareille. Il est pratiquement impossible de réduire dans les budgets de fonctionnement et, par conséquent, la solution qui se présente maintenant aux pouvoirs publics est celle d’aller vers plus de taxes. Mais si cette solution est appliquée de manière systémique et non graduelle, elle sera mal prise par les consommateurs. Quelles seraient donc, à votre avis, les mesures appropriées à prendre dans ce cas précis ? Le plus grand problème est celui de la dépense publique liée à plus de 50% à la fiscalité pétrolière. Nous avons le choix entre deux systèmes : le système norvégien ou danois disposant d’un fonds souverain qui investit dans le monde entier et qui est, généralement, gagnant avec une moyenne de 12% de rendement. Si l’Algérie avait mis ses dépenses, de l’ordre de 800 milliards de dollars, dans un fonds souverain à 10% de rendement, on aurait eu 80 milliards de dollars hors hydrocarbures. Quant au deuxième système, comme celui appliqué au Chili dont les revenus financiers dépendaient des matières premières, est celui qui prévoit des réformes structurelles urgentes à même de faire sortir le pays de cette dépendance. Bien entendu, l’impact ne sera pas visible immédiatement, notamment pour l’année en cours. Mais, en 2017, du fait de l’accumulation des déficits, l’Etat doit dépenser moins et éviter de gaspiller, rationaliser les dépenses, aller vers les niches fiscales, autres que celles trouvées chez les petits consommateurs, pour améliorer les recettes. Aussi, l’économie numérique doit devenir une trajectoire obligatoire, tout en revoyant le système administratif. Les recettes obligatoires doivent assurer au moins le budget fonctionnement et quant à l’investissement, il n’est pas nécessaire de maintenir la démarche actuelle, puisque nous pouvons nous diriger vers la bancarisation des investissements comme première étape, et vers la financiarisation de ceux-ci comme deuxième étape, en impliquant beaucoup plus le secteur privé. Pensez-vous que les pouvoirs publics se soient suffisamment préparés pour faire face à cette crise ? Tout le problème est là. Les institutions semblent être en veille et en alerte, mais sans qu’il y ait une solution consensuelle aux problèmes qui se posent. Elles peuvent être aussi dans une situation où elles attendent «le fait accompli» pour, ensuite, essayer de bricoler des solutions.
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El Watan