Pétrole, Syrie : l’Arabie et l’Iran en vive concurrence

L’Arabie Saoudite a adopté, lundi 28 décembre, son budget pour 2016, prévoyant un déficit colossal de 87 milliards de dollars en raison de l’effondrement des prix du pétrole. Ses recettes devraient plafonner à 137 milliards de dollars, au plus bas depuis 2009. Les dépenses publiques du royaume devraient elles s’élever à 224 milliards de dollars, notamment du fait des dépenses militaires, à cause de la guerre au Yémen et de l’instabilité dans la région.

Certes, l’Arabie possède des réserves financières infiniment supérieures, mais elle doit faire face à une baisse de la demande pétrolière sur les marchés internationaux qui s’annonce durable. La production et l’exportation du pétrole assurent en effet les trois quarts des recettes budgétaires de l’Arabie Saoudite.

Calculs politiques

Le gouvernement saoudien doit d’autant plus s’en vouloir que ce pays a été le premier à initier volontairement une chute des cours pétrolier. Son objectif ? Défendre ses parts de marché plutôt que les prix. Mais pas seulement : il veut aussi contrarier le retour du pétrole iranien, le grand rival régional. Certains calculs montrent en effet que Téhéran aurait théoriquement besoin d’un baril à 130 dollars pour annuler son déficit budgétaire.

Du coup on a vu le baril passer en quelques mois de 100 dollars à un peu moins de 37 dollars en cette fin 2015. En juillet 2008, l’or noir culminait même à 147 dollars – les experts n’excluaient pas à l’époque un baril à 200 dollars. Dans les pronostics de début 2014, le baril atteignait encore un cours à 110 dollars. La baisse est de 68% depuis juin 2014.

De multiples facteurs expliquent ce retournement du marché. Le ralentissement de l’économie mondiale au second semestre en est la première raison avec notamment une demande moins dynamique de la Chine, gros consommateur d’énergie. Il y a également la concurrence d’autres producteurs comme les États-Unis, devenus premier producteur mondial devant l’Arabie Saoudite grâce au pétrole de schiste. D’ailleurs, pour la première fois depuis quarante ans, les États-Unis vont pouvoir exporter du pétrole brut. La Chambre des représentants américains a en effet voté, vendredi 18 décembre, un texte qui ouvre la voie à la levée de cette interdiction.

Pour sa part, l’Iran, autorisé à revenir sur le marché, va augmenter sa production de pétrole et se servir de cette manne financière pour étendre son influence, déjà importante, au Moyen-Orient.

Fronts rivaux contre Daech

Au Moyen-Orient, la Syrie va en effet continuer de cristalliser les rivalités. Entre Russie et USA (et ses alliés), d’une part, entre Arabie Saoudite et Iran, d’autre part. À l’occasion de la 29e Conférence internationale de l’unité islamique tenue à Téhéran, le président iranien Hassan Rohani a implicitement accusé l’Arabie Saoudite de semer et de cultiver la violence et la misère au Moyen-Orient. M. Rohani estime que l’affaiblissement de la Syrie est contraire aux intérêts des pays de la région et regrette que de plus en plus de personnes quittent l’Afrique du Nord, la Syrie et l’Irak pour se rendre en Europe. Il a indiqué, sans citer directement l’Arabie Saoudite et ses importantes dépenses militaires, que si l’argent dépensé pour acheter des bombes et de missiles aux États-Unis avait été « distribué aux musulmans pauvres », il n’y aurait pas « de gens qui vont se coucher affamés ».

« Nous devons savoir que la terreur et le terrorisme ne seront pas détruits par les bombes », a souligné M. Rohani, en ajoutant que si des groupes comme l’EI pouvaient recruter des soldats, c’était à cause de la pauvreté matérielle et culturelle qu’il convenait d’éliminer « de la société islamique ». « Nous devons nous lever contre l’idéologie et le discours de la violence, propagés par les groupes djihadistes armés tels que l’État islamique (EI, Daech) et nous unir pour corriger l’image de l’islam dans l’opinion publique mondiale », a insisté le président iranien.

Paradoxalement, l’Arabie Saoudite a, elle aussi, fait de Daesh son principal ennemi officiel et a formé le 15 décembre dernier, une coalition islamique antiterroriste de 34 pays, dont l’Égypte, la Turquie, le Pakistan et le Sénégal. Une liste n’incluant pas l’Iran et l’Irak. Cette coalition témoigne « du souci du monde islamique à combattre le terrorisme et à être un partenaire dans la lutte mondiale contre ce fléau », a déclaré le futur prince héritier et ministre saoudien de la Défense, Mohamed Ben Salmane à Ryad.

« Ils ont récemment annoncé une coalition faussement appelée « islamique » et ont affirmé que son but était de combattre le califat », a répondu le chef de l’État islamique, Abou Bakr Al-Baghdadi. Il a appelé le 26 décembre à un soulèvement en Arabie Saoudite, le pays qui dirige cette coalition qui lutte contre le terrorisme, et promet même des attaques contre Israël. « Nous vous promettons, si Dieu le veut, que quiconque participe à la guerre contre l’État islamique le paiera chèrement ».

Un avertissement aux 34 pays de la Coalition à l’Iran et au reste du monde, notamment les Occidentaux. L’année 2016 s’annonce au moins aussi compliquée que 2015 dans la région.

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