Décryptage/ Le tourisme, parent pauvre du financement bancaire  

Décryptage/ Le tourisme, parent pauvre du financement bancaire  

 

Comme chaque année des millions d’Algériens se préparent à passer leurs vacances à l’étranger. On annonce que la Tunisie en particulier devrait accueillir près de deux millions de touristes algériens. Principale raison de cet exode annuel, notre pays manque cruellement d’infrastructures touristiques. Les banques sont-elles frileuses quand il s’agit de financer le secteur touristique en général et hôtelier en particulier ? Ce qui expliquerait en grande partie le retard pris par le secteur en Algérie, si on le compare en particulier aux pays voisins.

Pour la majeure partie des professionnels de l’industrie du tourisme les choses sont claires, les banques ne financent que marginalement cette activité. Leur argument principal repose le fait que le secteur touristique  ne pèse actuellement que pour moins de 1% des crédits bancaires à l’économie nationale.

 Du côté des banques publiques comme privées, on souligne, au contraire, que la profession a, au cours des dernières années, signé  de nombreuses conventions avec le ministère du Tourisme dans le but de renforcer la contribution du système bancaire national au développement du secteur.

Un gros retard à rattraper

Dans le but de rattraper  les retards accumulés par un secteur qui a fait longtemps figure de parent pauvre, les banques adoptent aujourd’hui une attitude plus favorable.  Un banquier privé nous confie; «Nous sommes plutôt en quête  de bons projets dans le secteur touristique et  tous les hôteliers qui ont des dossiers d’investissement bien ficelés avec un business plan et une étude de rentabilité claire bénéficient des concours de notre banque».

Des conventions de financement signées depuis 2012

Les ressources budgétaires se faisant de plus en plus rares, les responsables du secteur algérien du tourisme, qui se sont succédés  à une cadence accélérée au cours des dernières années, soulignent en chœur que la plupart des investissements relatifs au secteur du tourisme qui seront concrétisés à l’avenir seront pris en charge par le secteur privé.

Le financement des projets touristiques est couvert actuellement à concurrence de 60 à 70 % par les banques algériennes. Ce financement s’opère  dans le cadre d’une convention signée entre le ministère du Tourisme , celui des Finances et les banques. C’est Ainsi que  la Société Générale Algérie (SGA), Arab Gulf Bank (AGB), Banque El Baraka, Trust Bank et Salama Bank se sont engagées en 2014 à travers ces accords à financer les projets d’investissement dans le secteur touristique pour des montants  allant jusqu’à hauteur de 70% du projet et cela pour une durée de 12 ans au maximum. Ces accords viennent soutenir les conventions  déjà signées en 2012 avec les six établissements bancaires publics. Ces différentes conventions ont également prévu l’intégration du FGAR pour la partie garantie de financement des équipements.

Une forte bonification des taux d’intérêt… 

Les avantages dont bénéficient le financement  des projets touristiques sont très loin d’être négligeables. Depuis la LFC 2009, les investisseurs dans le domaine de l’hôtellerie au niveau des wilayas du Nord et de celles du Sud bénéficient respectivement d’une bonification de 3% et de 4,5% des taux d’intérêt applicables aux prêts bancaires .  Dans le cadre des conventions signées avec les pouvoirs publics, la durée de traitement des dossiers d’octroi de crédits ne doit, en outre, pas dépasser 30 jours pour les projets hôteliers et 40 jours pour le réaménagement et ce, à compter de la date de dépôt du dossier auprès des banques.

…et des mesures fiscales  incitatives 

Les mesures fiscales destinées à encourager l’investissement dans le domaine touristique se sont également  multipliées au cours des dernières années. C’est ainsi qu’entre autres avantages dont bénéficie le secteur, on peut mentionner que les activités touristiques sont soumises à l’IBS au taux de 19% (alors que les autres activités sont soumises aux taux de 25%) avec une  exonération pour une période de 10 ans pour les entreprises touristiques  à l’exception des agences de tourisme et de voyage. Le secteur bénéficie également d’une exonération permanente de la TAP ainsi que de l’application, jusqu’au 31/12/2019, du taux réduit de 7% de TVA. Le secteur du tourisme est enfin assujetti  au taux réduit de droit de douane sur les acquisitions d’équipements et d’ameublement non produits localement.

Renforcer les fonds propres des investisseurs  

Parmi les problèmes qui restent  à régler dans le domaine du financement  figure, selon des sources bancaires, celui du renforcement des fonds propres des candidats à l’investissement. «L’industrie du tourisme est fortement capitalistique et exige des fonds importants engageant des risques à très long terme. Les fonds propres engagés par l’investisseur lui-même doivent  servir d’amortisseur », explique un banquier. Face à cette équation complexe pour le secteur bancaire, les pouvoirs publics tentent d’associer au cours des dernières années les sociétés de capital risque au financement du secteur et mentionnent notamment la possibilité du renforcement des fonds propres d’investissement pour accéder aux financements bancaires avec la collaboration de la société El Djazair Istithmar active depuis quelques années ainsi que grâce aux fonds régionaux d’investissements créés également dans la période récente. Des solutions encore insuffisantes au regard des besoins financiers du secteur, selon beaucoup d’analystes qui réclament la création d’un fonds d’investissement spécialisé doté de ressources plus importantes. Un tel  fonds d’investissement dédié au secteur touristique serait susceptible de «mobiliser des fonds auprès d’organismes collectant de l’épargne longue (caisses de retraite, compagnies d’assurance, etc.) voire auprès d’investisseurs internationaux privés ou  des institutions multilatérales». C’est sans doute une des solutions envisageables. En tous cas, une chose est claire, il faut changer d’échelle dans le financement  du tourisme en Algérie.

Hassan Haddouche

 

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