Le fils Nacer demande la «réouverture» du dossier

Une petite foule se pressait hier au cimetière El Alia pour commémorer le 24e anniversaire de l’assassinat du président Boudiaf. D’anciens compagnons de route, mais également des anonymes ont salué la mémoire de Si Tayeb El Watani, assassiné le 29 juin 1992 à Annaba, alors qu’il assistait à une conférence sur les cadres. Un peu plus tôt dans la journée et à l’abri des regards, d’anciens responsables étaient venus en toute discrétion déposer une gerbe de fleurs. Depuis la mort de son père, Nacer n’a jamais accepté la version officielle sur l’assassinat. Si la thèse avancée par les autorités a incriminé le sous-lieutenant du groupe d’intervention spécial (GIS), Lambarek Boumaarafi, comme étant celui qui a tiré sur le Président, son fils Nacer a toujours désigné Khaled Nezzar, Tewfik, Larbi Belkhir et Smaïl Lamari comme étant les commanditaires de l’élimination de Mohamed Boudiaf. «Mohamed Boudiaf les dérangeait, car ses objectifs étaient clairs : l’élimination des mafias, la sauvegarde de l’Algérie et la démocratisation du système», affirme Nacer. C’est dans ce contexte que la famille Boudiaf a décidé de mettre en place un comité d’avocats algériens et étrangers pour demander la réouverture du dossier. Sur quelle base ? «Il y a de nouveaux éléments», a précisé Karim Mahmoudi, l’un des avocats du collectif, qui indique qu’un dossier est en voie de constitution. «Dans quelques semaines, nous adresserons au Président et au procureur de la République les nouveaux éléments en notre possession et réclamerons la réouverture du dossier», a affirmé Me Mahmoudi. La défense de la famille Boudiaf s’appuie sur des constatations, à défaut de preuves difficiles à obtenir. Ainsi l’auteur de L’Autopsie d’un assassinat relève de nombreuses zones d’ombre inexploitées par les autorités à l’époque. Dans une déclaration au site en ligne TSA, le fils de Boudiaf  avait relevé plusieurs anomalies lors de l’évacuation de son père : «Le chef de l’Etat était le dernier à être évacué de la salle. Trouvez-vous cela normal ? En arrivant à Boufarik, l’hélicoptère a tourné durant une demi-heure parce qu’il n’avait pas reçu d’autorisation pour atterrir. Le cœur de Boudiaf battait encore. Il est mort à Aïn Naâdja. Je pense qu’il aurait été sauvé s’il avait eu une prise en charge à Annaba. Mais ils ont tout fait pour que Boudiaf soit assassiné à Annaba.» Autre fait troublant soulevé : la présence d’un deuxième tireur jamais mentionné dans le rapport final. «Mohamed Boudiaf a reçu une balle dans le thorax qui n’a pas été mentionnée (dans les rapports), affirme le fils de Si Tayeb El Watani. Les médecins ont dit qu’il s’agissait, peut-être, de l’éclat de la grenade.» Dans une lettre ouverte lue au cimetière El Alia, Nacer Boudiaf demande au président Bouteflika de réparer l’injustice dont la famille de l’ancien Président est victime. «Je m’adresse à vous, alors que vous n’étiez pas au pouvoir au moment de son lâche assassinat. Mais la vérité est que l’écrasante majorité des Algériens ont compris, dès l’instant de l’assassinat, l’enjeu de ce crime pour ceux qui ont cru en bénéficier», déclare Nacer Boudiaf. Et d’ajouter : «La considération pour Mohamed Boudiaf ne sera mesurée que par la promptitude de la justice algérienne à réparer cette injustice qui a trop duré et entouré l’assassinat de celui qu’on a appelé — de son paisible exil — pour venir sauver l’Algérie.» Et de conclure : «Seule la réouverture du procès de son assassinat exprimera au peuple les réelles intentions du pouvoir en matière de justice et prouvera au monde extérieur que nous n’avons pas besoin d’une justice venue d’ailleurs pour mettre fin à l’impunité du lâche assassinat de Mohamed Boudiaf.» Au cas où la justice algérienne se montrerait réticente à la réouverture du dossier, Me Mahmoudi avertit : «Nous nous adresserons à la justice internationale.»    

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