«On pousse à bout la patience des Algériens»

La tournée des zaouïas, qu’effectue Chakib Khelil depuis son retour en Algérie, est «un plan orchestré pour le blanchir non pas par la voie de la justice mais par une décision politique et religieuse», affirme la secrétaire générale du Parti des travailleurs (PT), Louisa Hanoune. A  l’ouverture, hier, de la première session ordinaire du conseil national du PT, après la tenue en mars dernier de son congrès, Louisa Hanoune a alerté sur le danger qui guette l’Algérie avec le retour de Khelil «méprisant pour la justice et pour le peuple algérien». «Il choisit les petites zaouïas qui ont besoin de financement et de subventions, avec la bénédiction de l’Etat», dit-elle, en avertissant que ceux qui sont derrière cette manœuvre «jouent avec le feu… C’est la provocation de trop, on pousse à bout la patience des Algériens». Mme Hanoune dénonce, en évoquant Khelil, «un homme qui s’érige en oracle et se permet de faire des prédictions et prospectives sur la situation politique et les retombées de la crise comme s’il détenait le pouvoir de décision ou envoyé par l’administration américaine». Et d’ajouter : «Quand Khelil va dans les zaouïas, ce n’est pas pour prier mais pour faire de la politique… C’est unique dans le monde. Ailleurs, les personnes citées ou soupçonnées dans des affaires de corruption et de détournement de deniers publics sont jugées, chez nous on leur façonne une image de saint.» Louisa Hanoune estime que c’est là une manœuvre dangereuse aux conséquences terribles. «Veut-on enlever toute crédibilité aux zaouïas et pousser nos jeunes dans les bras de pratiques religieuses extrémistes comme celles de Daech ? Non, cette tournée n’est pas spontanée, comme le dit le ministre des Affaires religieuses, elle est bel et bien planifiée et préparée par son ministère même», accuse Mme Hanoune. Cette dernière estime que «l’Etat est impliqué dans cette manœuvre… Le ministre des Affaires religieuses est responsable de ce plan criminel… La direction de son ministère à Chlef a envoyé des invitations aux élus pour assister à la visite de Khelil à la zaouïa, impliquant ainsi l’Etat dans une dangereuse dérive». Louisa Hanoune s’interroge aussi sur la partie qui a autorisé Khelil à tenir des réunions politiques pourtant soumise à conditions. La responsable du PT critique les personnes de l’intérieur comme de l’extérieur du pays qui «actionnent cet individu pour des objectifs très dangereux… Connaissant l’homme et ce qu’il a fait en Argentine, s’il accède à une haute fonction, c’est pour accélérer la dilapidation des richesses de notre pays». La leader du PT revient sur la politique suivie par Khelil quand il était en poste avec ses décisions en totale «trahison du principe de souveraineté nationale sur les mines et les hydrocarbures». Autre remarque avancée par Mme Hanoune concernant les apparitions publiques de Chabik Khelil est celle «d’accaparer l’attention des Algériens sur ses déplacements pour détourner leur regard du plan de siphonage des  fonds publics qui se fait sur fond de crise économique». Une crise réelle mais qu’on n’affronte pas avec les bonnes solutions. «Le président de la République avait déclaré que nous disposions de fonds nous permettant d’être à l’abri du besoin pour une période de quatre ou cinq années, il se trouve toutefois qu’une année seulement après cette déclaration, on nous dit qu’on est en zone rouge. Que s’est-il donc passé, pourquoi une telle descente aux enfers pour la majorité des Algériens ? Est-ce que le Trésor public est en situation de faillite ? Si tel est le cas, les Algériens sont en droit d’être informés et de savoir aussi comment cela est arrivé», estime Louisa Hanoune en notant que la nouvelle orientation de la diplomatie algérienne, en prônant une voix forte à l’étranger, a besoin d’une situation interne solide et stable. «Nous nous attendions, après la provocation du tweet de Valls, à une révision du code des investissements très favorable aux Français, mais cela ne s’est pas fait… Nous assistons au contraire à une politique de fuite en avant et l’option de l’emprunt obligataire présenté comme solution à la crise est en fait un piège mortel pour l’Etat algérien et une forme de blanchiment d’argent pour les criminels et les terroristes.» La secrétaire générale s’interroge sur la nature de cet emprunt obligataire dont personne ne connaît le plafond ni les projets qu’il vise. «Qu’on commence par recouvrer les 100 milliards de dollars d’impôts non payés auprès des oligarques au lieu de maintenir dans la précarité de larges couches de travailleurs… Regardons ce qui se passe aujourd’hui au Brésil après que ce pays ait misé sur l’investissement étranger pour se sortir de la crise, c’est la dérive qu’il a eue… L’orientation économique actuelle en Algérie vise à détruire tous les garde-fous au profit de quelques hommes d’affaires, ce virage est très dangereux pour le pays», avertit Mme Hanoune en notant que son parti, en l’absence de signes d’apaisement, se tient «prêt à toutes les mobilisations pour encadrer le déferlement populaire et éviter toute dérive sanglante».        

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