L’ancien leader du FIS, Abbassi Madani, rompt un silence qui dure depuis plus de 20 ans, quant à son rôle et celui de son parti lors de la décennie noire, notamment dans la recherche d’un accord politique.
Dans ce témoignage vidéo diffusé par la chaîne El Magharibya, l’ancien leader du FIS raconte sa version des faits et rappelle les événements qui ont conduit au déclenchement de la guerre civile durant les années sanglantes de la décennie 90. Il relate les conditions dans lesquelles il a été approché par le DRS et ensuite par Liamine Zeroual.
Abbassi Madani raconte qu’une personne se disant du DRS était venue le voir en prison, au nom de Zeroual, en 1993, et qu’il a refusé de rencontrer. Pour rappel, Zeroual, lui-même, a nié catégoriquement avoir demandé à quiconque de dialoguer avec la direction du FIS. Ces révélations donnent d’ores et déjà un aperçu sur l’opacité qui caractérisait le fonctionnement des appareils sécuritaires durant les années 90.
Abassi Madani raconte également sa prise de contact avec le général Daradji, auquel il aurait formulé le vœu de sortir de prison accompagné de Ali Benhadj pour mettre fin au brasier, quitte à retourner ensuite en prison. Cette demande a été, selon lui, rejetée par les décideurs de l’époque. Mais le leader du FIS ne dit pas pourquoi il n’avait pas lancé à partir de sa cellule un appel à la cessation des hostilités afin d’épargner au pays la catastrophe que l’on sait.
Liamine Zeroual, la voix de la raison
À propos de Zeroual, Abbassi Madani déclare qu’il «faisait partie des personnes au sein du pouvoir qui cherchaient une solution politique. C’est la preuve que ce n’était pas toute l’armée qui avait suivi Nezzar et ses amis. Une bonne partie decelle-ci a pu faire pression et a changé les choses au sommet de l’État après que Nezzar ait quitté le ministère de la Défense», ajoute-t-il.
La première prise de contact entre Abbassi Madani et Zeroual s’est faite «après la création d’un comité national chargé de trouver un accord politique. Une délégation composée du général major Derradji, d’avocats et d’un représentant des Associations des droits de l’Homme est venue nous voir (avec Ali Benhadj) dans le cadre de cet accord. On les a reçus plusieurs fois avant que Zeroual ne devienne ministre de la Défense. Alors, le Conseil national de sécurité lui confie la mission de négocier avec nous. À ce moment-là, nous avons été contactés pour dialoguer. Nous avons accepté sur la base d’un principe qui est celui de ne jamais fermer la porte au dialogue (…) Abdelkader Hachani (ex-dirigeant du FIS en liberté) est parti avec la proposition de dialoguer avec les partis politiques en attendant de le faire avec le pouvoir» indique encore Abassi Madani.
Les déclarations et les révélations, qui se multiplient ces derniers temps, semblent être motivées par des velléités politiciennes mises en scène par deux, voire trois clans, qui cherchent à exploiter ce traumatisme profond à des fins politiciennes. Elles visent, d’une part, à crever un abcès susceptible, un jour, de déverser une réalité toxique qui affectera irrémédiablement la société.
Elles visent, d’autre part, à faire bouger la société. Et c’est probablement l’objectif d’Abbassi Madani. De telles “vérités” peuvent en effet constituer un facteur de mobilisation contre un régime aujourd’hui considérablement affaibli.
Mansour Massinissa
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